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Celui qui n’était pas libre de répondre à mes désirs (7) …des Allumeurs.

Lundi, janvier 28th, 2008

L’Homme marié avait promis de se faire discret. Il n’a pas tenu parole. Loin de se contenter de me “tenir au courant” de son “parcours”, il a continué à me parler régulièrement sur MSN et de mon côté je n’ai pas réussi à rompre le contact. Cela a commencé le lundi suivant, 22 octobre, par un long chat amical et très « innocent »…qui a repris deux jours plus tard. J’avais des problèmes domestiques, et il a fait mine de ne pas me proposer de venir m’aider, de peur que j’interprète mal son généreux élan : «si je te propose de venir faire le plombier, tu vas me dire que c’est un prétexte pour monter chez toi et que même si honnêtement je suis persuadé du contraire etc.». Voilà un schéma qui s’est reproduit par la suite : il propose de manière plus ou moins détournée de me revoir, mais se rétracte en jouant l’ingénu. J’ai essayé de lui faire comprendre qu’en tant qu’adultes on pouvait peut-être reconnaître certaines pulsions : «j’ai juste dit qu’il y avait des chances que ça dérape ce que tu ne veux pas admettre / or tu as déjà croqué le fruit défendu ». Et il répond sans réaliser qu’il est en pleine contradiction : «croqué, tu y vas fort, juste senti et effleuré, d’ailleurs il sent bon et il est doux mais c’est totalement objectif, donc danger ».
J’attends le moment où il sera prêt à admettre qu’il y a de l’unfinished business dans l’air. Quelques jours plus tard, après une interruption pour cause de vacances, il annonce qu’il s’absentera pendant trois semaines. J’avais raison de penser qu’il allait finir par craquer. N’y tenant plus, il se lâche enfin.

LUI - et ben tu es allongée alors j’en profite, l’autre jour, tu étais douce et sensuelle comme rarement je l’ai ressenti, et tu m’as embrassé merveilleusement ; comme ça tu ne peux pas tomber de ta chaise

Je ne m’étais pas préparée à une telle révélation. Elle me fait suffoquer. J’ai l’impression qu’il est de nouveau en train de m’embrasser et je ressens le même effet que lorsque c’était réel. Il faut que je saisisse l’occasion avant qu’il trouve le moyen de changer de sujet. Je réponds délibérément en insistant sur le côté purement sexuel de mes envies, au cas où ça le rassurerait de comprendre que je ne voulais pas d’une liaison romantique.

MOI- moi aussi j’ai trouvé ça sensuel ; franchement ça faisait très longtemps que je n’avais pas été aussi excitée par un baiser ; du coup j’étais très embêtée le lendemain
LUI- tu vois, le frisson était tout partagé
MOI- c’est bien pour ça que c’était excitant
LUI- enfin moi je crains que cela ne se soit vu
MOI- oui, je sais, c’était drôle ; mais en réalité j’étais dans le même état ; tout en étant très attérée par tout ça
LUI- drole drole, mais tu vas me vexer!
MOI- pourquoi?
LUI - (ouf, j’ai trouvé une pirouette de sortie)
Moi (ah non, tu ne sortiras pas si facilement de cette conversation, mon coco) - si c’était drôle parce que c’était à travers une espèce de doudoune ; je sais là tu te dis qu’on va trop loin
LUI- pourtant j’en avais prise une épaisse
MOI- mais franchement je ne vois pas où est le problème si tu te casses trois semaines ; tu as déjà eu le temps de digérer ce baiser
LUI- la meilleure gastronomie ne s’oublie jamais, pense aux madeleines ; tiens d’ailleurs, j’ai super fin moi ; faim ou la la
MOI - oh le beau lapsus ; tu essayes de t’échapper là (et tu n’y arriveras pas si facilement…) est-ce que tu avais compris que moi aussi ça m’avait fait de l’effet?
LUI – oui ; je sais qu’on avait mutuellement très envie l’un de l’autre

Bon, je pense que désormais il ne nous reste plus qu’à assouvir une envie mutuellement avouée et partagée, qu’il vient opportunément de réactiver. En plus, il enfonce le clou : « en tout cas, c’était un des baisers les plus érotiques de ma vie / tu dois être une magnifique amante ». Je lui explique que je suis frustrée par sa faute, et il insiste encore « ou la la, on va vraiment devenir dangereux ». Je réponds que je ne vois pas ce qui serait dangereux. A t-il compris qu’il avait le feu vert pour entreprendre de me revoir avec autre chose que des intentions innocentes ? Je pense que oui, et je me trompe.
Même pendant son voyage, quand il arrive à se connecter, il continue à attiser l’envie, par exemple en me proposant des massages. Lorsqu’il rentre en France entre deux départs, il recommence son petit jeu : il me demande en plaisantant de l’héberger à cause des grèves. Il promet qu’on se reverra bientôt, je lui dis de ne pas trop tarder, et là tout ce qu’il trouve à me dire c’est qu’il souhaite que je tombe amoureuse d’un autre : « je serais ravi et sincèrement, si tu me disais que tu étais heureuse et amoureuse dans 2 3 5 ou 10 jours ». Je suis exaspérée.

MOI- tu sais, je trouve que ton attitude est celle d’un allumeur ; et ça ne me plaît pas ; parce que relis tes chats
LUI- je te sentais énervée aujourd’hui ; j’aurais pas dû
MOI- non, je ne suis pas énervée
LUI - c’est pire pour moi
MOI- c’est-à-dire que cette hypothèse se vérifie ; à chaque fois que tu m’écris, tu me fais des compliments, des allusions coquines ; donc tu m’allumes et depuis notre baiser j’y suis sensible ; mais tu te rétractes
LUI - rappelle toi que qu’à la base, on ne veut d’une liaison ni l’un ni l’autre ; désolé, sincèrement, mais ça sur le compte des hormones
MOI (les hormones, à son âge, je rêve ! ) - c’est trop facile ; je n’ai pas dit que je voulais d’une liaison et je n’ai pas changé d’avis (…) mais il y a aussi le plan cul tu le sais bien ; tu sais bien que je suis sensible quand on m’allume ; c’est partout dans mon blog (…) traite les autres de goujat tant que tu peux ; pour moi le goujat en chef c’est l’allumeur
(…)
Lui – l’allumeur, comment ne pas l’être alors que tu ne veux ni liaison ni plan cul, je ne sais pas
MOI- mais tu n’as pas compris: j’ai dit que j’étais OK pour tenter le plan cul
(…)
LUI- ahh, là j’avais pas compris du tout
MOI- parce qu’une alchimie comme celle là n’est pas banale
LUI- vu et reçu
Moi- enfin tu te fiches un peu de moi là
LUI- non honnêtement ; je suis sans doute un peu naïf et benet mais j’avais pas saisi que tu laissais la chance ; je comprends nettement mieux l’allumeur maintenant

Il explique qu’il a tendance à faire des compliments à tour de bras sans penser à mal, qu’il fait ça avec sa (vieille) secrétaire. Oui, mais a-t-il embrassé sa secrétaire ? Il admet qu’avec moi il entretient une grosse ambiguïté, parce que « ce qui est anodin et presque réflexe » avec d’autres, il doit admettre qu’il aimerait bien le « réaliser » avec moi. Il reconnaît qu’il m’a allumée, et propose de se faire « silencieux et discret », qu’il finira par se libérer. Je n’avais pas compris que sa résolution de ne plus me parler commençait à cet instant même.

Mettre son bout : l’obsession du séducteur. Mettre les bouts : l’obsession de l’allumeur*.

(A suivre)

* Petit cadeau d’un de mes lecteurs…

Celui qui n’était pas libre de répondre à mes désirs (6) … et Misère…

Lundi, janvier 21st, 2008

Loin de se démonter par l’issue abrupte de notre première rencontre, l’Homme marié voulait me revoir. J’ai eu la naïveté de croire cela voulait dire qu’il voulait reprendre là où on en était, et que la décision de poursuivre ou non me revenait. Je n’étais pas sûre d’en avoir envie. D’un côté il y avait le sentiment que ni sa personne ni sa conversation ne m’avaient séduite. De l’autre il y avait une curiosité physique née de ce baiser tellement réussi.
Le lendemain de notre dîner, dans l’après midi, il me rejoint sur MSN et je me rends compte qu’avec lui, les choses sont bien plus compliquées qu’elles n’y paraissent. Il veut se rassurer à propos de son élan de la veille, ça l’embêterait beaucoup d’avoir raté son effet :

LUI - bon dis moi, ça m’a travaillé de savoir si tu regrettais notre au revoir sans doute trop complice aux yeux de ce qu’on avait mutuellement décidé ; (crois le si tu le veux, mais je suis venu avec l’idée que le moment serait courtois et agréable, avec poignée de main à la fin)
MOI - oui peut-être bien ; mais tu recommences un schéma déplaisant que tu m’as déjà décrit ; je vérifie si j’arrive encore à séduire ; de même: je réussis (je voulais écrire « vérifie » donc lapsus: son baiser était réussi), si je peux encore embrasser ; bander ; bref, tout cela pour ton ego, cela n’a rien à voir avec moi

Je savais qu’il avait des choses à se prouver et qu’il m’utilisait en quelque sorte pour remonter dans sa propre estime. C’était un leitmotiv de nos conversations. Lorsqu’il avait entrepris de m’embrasser c’était pour se prouver qu’il y arrivait encore. Il m’avait aussi raconté qu’il avait failli tromper sa femme mais qu’il s’était dégonflé au dernier moment : nul besoin de concrétiser puisque ce qu’il voulait, c’était se rassurer sur sa propre capacité à séduire. Il ne s’est même pas défendu quand il m’a répondu.

LUI – C’est vrai, mais c’est humain, et je pense que c’était surtout dans l’instant ; et par rapport à toi c’est pour cela que ça m’a travaillé ; je suis arrivé à la conclusion que de deux choses l’une ; Ou tu considérais que tu avais trop bu et que j’avais profité de la situation ce qui ferait d’une merveilleuse soirée un fiasco à mes yeux ; parce que j’aurai été un goujat égoïste ; Ou tu considérais somme toute qu’on était pas sur la voie ni d’une liaison dévastatrice, ni d’un coup sans lendemain, mais que c’était simplement un épilogue spontanné et pas si désagréable d’un bon moment, et un partage de tendresse qui m’a fait un bien fou :et là c’est positif pour les deux et j’en serai ravi.
MOI- tu ne comprends pas que c’est les deux à la fois ; au sens propre ; simultanément tu te montres tendre et agressif ; j’ai fini par avoir l’impression d’être avec philippe léotard dans un film de pialat ; d’où ma dernière réaction
LUI - je le comprends très bien, toute la complexité de la situation est de gérer des pulsions et des décisions totalement contradictoires ; que j’ai admis sans problème, je crois que tu as eu raison et que tu as été plus forte que moi
MOI- non, je n’ai pas eu besoin d’être forte là ; de toute façon rien n’aurait pu me faire changer d’avis ; même et surtout si tu m’avais plu (traduisons : tu ne m’as pas séduite).
(…)
LUI - dis moi, aurais tu préféré que je te fasse une bise au croisement et que je rejoigne sur le champ la station de taxi?
MOI – (pensant non) - je n’en sais rien ; tu sais il ne faut pas que tu accordes une telle importance à ce qui s’est passé ; on n’est pas allé bien loin ; compte tenu de mon passif de fille facile devant l’éternel
LUI - la seule que je lui apporte, c’est ai-je été inélégant et t’ai je fait du mal ; quant à la fille facile, je n’ose imaginer ce qu’est une fille difficile.
MOI- mais non tu ne m’as pas fait du mal ; après cela n’enlève rien au fait que tu n’as pas été très délicat ; mais ce n’est pas important ; admettant pour la première fois que j’avais aimé, mais à mots couverts - je veux dire que si c’est ça me faire du mal, tout va bien
(…)
LUI - Souhaites tu que nous testions le thé un jour dans un salon, un restau, chinois, coréen, vietnamien ou tout autre estaminet du genre, ou préfères tu que nous poursuivions nos échanges écrits au fur et à mesure de ma “libération”?
MOI - ta libération risque de prendre des mois
LUI - ou rien du tout, c’est présomptueux d’omettre cette hypothèse
MOI - oui c’est vrai ; je ne sais pas trop quelle attitude adopter ; il y a le risque que ça dérape ; le cas échéant que ça serve juste à rebooster ton ego ; voire que finalement tu préfères être avec ta femme
LUI - Saskia, d’ors et déjà, la machine à laver dans laquelle tu m’as fait passer lors de nos premiers mails à fait beaucoup de bien à mon égo et je ne t’en remercierai jamais assez ; ensuite, en ce qui concerne les risques, tu es seule juge
MOI- interprétant sa dernière remarque de travers - donc tu admets que tu veux aller plus loin ; que c’est à moi de décider ; ne sachant pas quelle attitude adopter ; ça m’embête un peu
Lui - ooops pas si vite ; plus loin peut avoir plusieurs sens
Moi - je veux dire coucher ; c’est le premier sens
LUI - donc j’ai eu raison de dire pas si vite ; quand je te propose de se revoir ; c’est pour un schéma comme celui d’hier sans cet élan presque puéril (mais je m’attendrirai presque dessus tout seul) que j’ai eu en te laissant ; d’ou mon allusion au thé sans alcool, comme ça on prendrait même pas le risque
Moi - consternée par tant de mauvaise foi - je crois que tu mens sans même t’en rendre compte ; parce que c’est une façon de m’apaiser en me disant une fois de plus qu’il n’y pas de risque
LUI - bah, c’est pas très délicat pour ma capacité à me fixer une ligne de conduite
MOI (mais pourquoi prétend-il se fixer une ligne de conduite, vu ce que cela a donné la veille ?) - bon je commence à trouver tout ça inutilement compliqué
LUI - alors s’il y en a Saskia, je retourne régler mes problèmes, mais renforcé et plus sûr de moi, et j’espère que tu auras une vie à la hauteur de tes espérances
MOI (ne comprenant pas pourquoi il a si peur des risques) - évidemment qu’il y en a ; c’est la première fois que j’étudie la “faisabilité” d’une liaison, voilà ce qu’est l’adultère
LUI - ça restera pour moi un échange entre deux personnalités intéressantes, suffisamment intense pour qu’il soit prenant, et suffisamment innocent pour qu’il reste un bon souvenir mutuel
MOI (donc il se prend pour une personnalité intéressante, est-ce à lui de le dire ?) - je vois

J’annonce mon départ, et il me dit au revoir en ayant l’air satisfait. De mon côté, je suis très mécontente de cette conversation. J’ai compris pourquoi il avait d’abord affiché une certaine prudence. Vu ma réaction de la veille, il pouvait légitimement croire qu’il m’avait heurtée. En même temps comment avait-il pu manquer l’effet qu’avait eu son baiser sur moi ? J’avais l’impression de lui avoir fait comprendre que je ne l’avais pas si mal pris.
Mais je commence à comprendre ce qu’il a dit en premier. Alors que c’est moi qui ai mis fin au baiser, il affirme qu’il ne se serait rien passé de plus, ni « une liaison », ni « un coup d’un soir » : je l’avais devancé en le repoussant, et d’ailleurs j’avais eu raison, j’avais été « plus forte » selon lui. Pourquoi tant de scrupules à propos des coups d’un soir ? Les hommes sont en général preneurs… A quoi rime ce déni du « risque » ? Il n’y avait que le risque qui m’intéressait, c’était bien le sens du mail que je lui avais envoyé avant notre rencontre.
Mais je n’avais pas saisi qu’il souhaitait me revoir en pur esprit. Je le soupçonnais fortement de se mentir à lui-même, et pire, d’avoir besoin de me séduire encore, peu convaincu de sa première prestation.
Je décide de ne pas en rester là et de lui dire le fond de ma pensée et je lui écris après quelques minutes :

MOI- je sais pas où tu mets la limite entre prenant et innocent, tout repose là dessus ; je veux des rapports francs avec les gens, je n’ai pas l’impression que c’est vers ça qu’on va
LUI - alors n’y allons pas, moi je ne veux pas t’apporter de problèmes, n’y m’en créer on en a suffisamment pour ça
MOI - d’accord
LUI - et pour info, le prenant était intellectuel, l’innocent physique et je suis de bonne foi ; on se tiendra au courant de nos parcours, tu veux bien?
MOI n’en croyant pas un mot - tu te crois sincèrement de bonne foi, je le sais bien

L’innocent est physique. N’importe quoi. Je suis exaspérée. Il n’avait pas le droit de m’embrasser et de me donner envie de lui s’il pensait qu’il valait mieux qu’il ne se passât rien. J’avais été bernée.

( A suivre)

Celui qui n’était pas libre de répondre à mes désirs (5) Splendeur …

Mardi, janvier 15th, 2008

L’Homme marié m’a répondu le lendemain par un mail qui m’a un peu déçue. Je sentais qu’il n’avait pas saisi toute la portée du mien. Il ne pouvait pas deviner qu’accepter de le voir était presque un revirement pour moi, mais il était si préoccupé de ses propres problèmes qu’il ne s’intéressait pas aux miens.

Tu sais, quand tu as partagé la photo de ton chat, j’ai été touché par cette marque de confiance, je suis convaincu qu’il est très important pour toi et j’ai pensé que ce vers vous allait bien.
Si je peux te rassurer, tu ne risques pas grand chose, je ne ressemble à rien en ce moment, je n’ai repris que 2 kg sur les 6 que j’ai perdu depuis Août et je ne te parle même pas de mes valises…

Non, ce n’était pas une marque de confiance que de montrer mon chat : au contraire c’est ma doublure quand j’élude mon portrait. J’ai trouvé assez triviaux ces détails physiques, alors que pour une fois j’avais parlé d’émotions (mais je suis la première à faire ce genre de remarques pour « abaisser les attentes » avant une rencontre et ainsi moins risquer de décevoir. C’est un des réflexes de ceux qui ont une mince estime d’eux-mêmes).
On a pris rendez-vous un mercredi soir, celui des premières grèves, qui lui avaient donné un prétexte idéal pour passer la nuit à Paris au lieu de se retrouver coincé dans sa banlieue le lendemain. J’avais rangé mon appartement au cas où je l’inviterais pour un dernier verre, mais j’avais exclu l’idée de coucher avec lui ce soir-là, surtout parce que c’est ce que j’avais dit et répété dans notre conversation sur MSN. (Ne me faisant pas confiance, j’ai une technique anti-dérapage qui consiste à laisser un détail qui tue dans mon accoutrement et c’est totalement dissuasif. Inutile de me demander ce que c’est, je n’avouerai pas !)
Ce soir-là, donc, il m’attend à la table d’un restaurant que j’ai choisi, pas très loin de chez moi. Lorsque je le découvre, je suis surprise du décalage très profond avec la façon dont je l’avais imaginé. On le distinguait mal sur la petite photo de MSN, et cela avait donné libre cours à mon imagination, sans que je méfie.. Celui que j’avais imaginé jeune encore m’apparaît totalement ravagé. Un visage qui est loin d’être laid, mais tiré par la fatigue et dont on peine à distinguer les yeux tant ils sont obstrués par des poches assez lourdes. Je ne peux pas m’empêcher de penser que toutes mes hésitations et mes attentes ont été vaines, puisqu’il ne peut me séduire dans cet état. Je comprends maintenant son insistance pour me prévenir de son aspect physique. Je suis déçue et soulagée à la fois.
Ensuite sa voix, souvent trop forte, ne correspond pas à ce que j’avais imaginé, mais comment aurait-il pu en être autrement ? Je l’avais aimée sur mon répondeur pourtant, mais son intonation et ses monologues me font irrésistiblement penser à Serge Gainsbourg. Il parle beaucoup, mange vite. On commande du vin, beaucoup de vin, on fume aussi, un peu trop, ce dont j’ai largement perdu l’habitude. Moi aussi je suis animée et je défends mon temps de parole. Il ne me reste que des bribes de cette soirée agréable mais pas passionnante. Personne ne cherche à séduire, et le seul compliment auquel j’ai droit c’est « tu es charmante » : pas de quoi fouetter un chat.
Quand on quitte le restaurant, il parle de choses qu’il a à régler ce soir-là à Paris (je ne peux pas entrer dans les détails et ils ont peu d’importance). Toujours est-il que je comprends qu’il va me quitter bientôt, je n’ai donc pas à lui proposer de prolonger la soirée. Je lui indique où nos chemins se séparent mais il propose de me raccompagner. C’est inutile mais j’accepte malicieusement : je suis curieuse de savoir s’il tentera quelque chose… sans y croire vraiment et sans m’intéresser outre mesure à l’enjeu. Il me suit jusqu’à la cage d’escalier, et il me fait la « bise », ou plutôt embrasse longuement chacune de mes joues. Il dit qu’il espère savoir encore le faire. Quoi, la bise ? Je suis perplexe, et le temps que je reprenne mes esprits, il a dérapé sur mes lèvres closes. Loupé ! Il recommence. Cette fois je joue mécaniquement le jeu. Et je plonge dans ce baiser sans crier gare. Il embrasse extraordinairement bien, tout en douceur, mais sans mollesse. A un moment je suis appuyée contre le mur, à un autre il me serre dans ses bras et dit que ça lui fait du bien, puis recommence à m’embrasser, et nous sommes totalement synchrones. Jamais il me semble avoir été si troublée par un seul baiser. Le Golden Boy est battu. Dois-je imputer cela à l’alcool, à l’absence de relations qui m’ont réellement touchée depuis des mois ? Toujours est-il que le désir est là, bien réel et que cela faisait longtemps que je ne l’avais pas ressenti si violemment. Et pourtant je suis agacée par cet homme qui continue à parler, trop fort de surcroît. Tout à coup je devine son sexe qui bondit à travers d’épaisses couches de vêtements. Loin de se démonter, il se déclare « plein de désir ». Ouh là, il faut que je m’échappe, vite. Je le trouve agité, ingérable. A une autre de ses saillies, je lui dis sèchement « tu as un comportement d’ivrogne, tu m’embarrasses devant mes voisins ». Il est comme un petit garçon qu’on vient de prendre en faute, il balbutie qu’il ne savait pas… je m’échappe dans l’ascenseur et je joue la consternation.
Je reçois ce SMS juste après l’avoir quitté :

L’ivrogne te souhaite la plus douce des nuits (…) et te promet que le prochain diner se fera aux sushis et au thé sans alcool si tu le veux bien !

Je suis incapable de dormir en raison d’un mal de tête que j’impute à l’alcool. Je me repasse sans arrêt le film inattendu de ce baiser, par lequel l’Homme marié a réussi à planter en moi un besoin pas encore totalement formulé, celui de recommencer…

(A suivre)

Celui qui n’était pas libre de répondre à mes désirs (4) Les Confessions, suite.

Mardi, janvier 8th, 2008

Deux semaines plus tard, on est déjà mi-octobre, l’homme marié me croise sur MSN et nous engageons la conversation comme deux vieux amis. Je lui demande des nouvelles de son couple. Aucune réconciliation, mais pas de réelle séparation. Une « paix armée » dira-t-il un autre jour. La conversation est facile, il ne cherche plus désormais à me « divertir » et à m’impressionner à tout prix et une petite complicité s’installe. Au bout d’une heure et demi, il évoque de nouveau le désir de me rencontrer: je lui avoue m’être « dégonflée » à ce propos, et je lui explique pourquoi.

MOI - tu comprends, je ne veux pas être impliquée dans tes histoires, même de loin
LUI - pas de souci, c’est par rapport à moi, j’aurai bien aimé que tu me voies sous mon vrai jour, indépendamment du contexte, tu vois, c’est totalement ridicule vu que tu es de fait une inconnue, mais l’opinion que tu as de moi m’importe ; orgueil mal placé sans doute
MOI - je ne comprends pas tellement effectivement qu’as tu à me montrer à moi? vraiment je ne comprends pas ; tu vois bien que tu as une image de moi totalement fabriquée par des fantasmes ; c’est que du virtuel
LUI - juste, mais ce n’est plus du tout ni physique, ni sexuel, c’est juste de la curiosité vis à vis d’une discussion a un instant t qui était très vraie et importante pour moi
MOI- dénégation: comment ça pourrait être physique si tu ne m’as jamais vue ? (….) je n’ai pas envie de savoir ce qui se passe si on se voit (….) même si comme tu le sais, les chances qu’il se passe un truc sont minimes
LUI - le minime est flatteur, même si et je pense que tu le sais, je ne l’envisage même pas
MOI- ah non que les choses soient claires ; il ne se passerait rien bien entendu puisque je l’ai dit ; mais après on se fait quand même des idées
(…)
LUI - mmm, ça par contre ça me vexe un peu, je n’ai plus quinze ans quand même ; je comprends que tu ne veuille pas me voir
MOI- pourquoi dis-tu je n’ai plus 15 ans ; je parle de mes réactions, pas des tiennes
LUI - les idées après une rencontre, quand les choses sont claires elle sont claires
MOI- non, elles ne sont jamais claires voyons
LUI- réagissant à mon avant-dernière remarque – ooops pardon je n’y étais pas
MOI - A la limite que tu aies envie de me sauter ne serait pas un problème ; sauf si moi aussi j’en ai envie ; et donc je ne veux prendre aucun risque ; tu vois c’est le principe de précaution
(…)
LUI- je te refais la proposition avec le jugement du tribunal en scan Pdf d’ici quelques mois
MOI- pff; ça ne changerait rien (…) je vais te décevoir: je crois que tu seras toujours une galère que je ne veux pas approcher
(….)
LUI - une galère assez potentiellement commestible pour qu’on la tienne à l’écart, ça me convient tout à fait, j’ai besoin de me reconstruire mon estime de moi

Ah j’étais bien raisonnable, bien déterminée à cet instant à ne pas me laisser piéger et doucement porter vers cette rencontre que je voulais prudemment éviter. Mais je sentais déjà qu’il m’en coûtait, que j’aurais du mal à m’y tenir, parce que sa conversation était agréable, surtout dans cette période de vaches maigres meeticiennes. Et puis patatras, vers la fin de cette conversation, il m’a touchée ou, pour être exacte, je me suis touchée moi-même. Un lecteur attentif se rappellera que je suis sensible à la façon dont les hommes traitent mon chat, et qu’en général j’aime les hommes qui aiment les chats. Donc vers la fin de cette conversation MSN, je montre en miniature la photo de mon chat pour une raison annexe. Et l’homme marié m’explique qu’il aime les chats, comme les « amoureux fervents et les savants austères ».
J’enchaîne :

Aiment également dans leur mûre saison
les chats puissants et doux
orgueil de la maison
qui comme eux sont frileux
et comme eux sédentaires

J’ai coupé en deux les alexandrins, mais c’est comme cela que je l’ai tapé sur MSN. Cette typographie m’a parue plus belle, et elle m’a aidée à comprendre, pour la première fois, que ce poème parle de moi ! Je suis heureuse que mon lecteur m’y ait aidé involontairement et lui me remercie pour « ce moment ». A partir de cet instant, j’ai envie de le rencontrer, et je ne peux plus retourner en arrière. Le lendemain, je lui écris un mail que je n’envoie pas immédiatement. Ce soir-là, j’ai revu un amant avec lequel les choses ont tourné au vinaigre, et j’ai sans doute comparé cet homme marié (sans le connaître toutefois) avec celui que j’avais en face de moi, qui me décevait, et que je décevais aussi.
A ce moment-là j’étais désenchantée des rencontres, entrecoupées de vide, que je faisais, et je mûrissais le post que j’avais décidé d’appeler Ich bin ein trentenaire célibataire parisien. Je commençais sérieusement à me demander si la vie de couple à laquelle je croyais aspirer était faite pour moi. Alors que me restait-il ? Etait-il prudent de renoncer aux rencontres libertines sous prétexte qu’elles m’éloignaient de mon objectif ? J’étais la première à dire qu’elles pouvaient donner lieu à plus. Et quand bien même elles ne donnaient rien, elles avaient tout de même le mérite d’exister !
Dans ce cas, il m’apparaissait plus prudent de saisir les occasions qui s’offraient à moi, sans préjuger de la suite des événements, sans ériger des barrières morales et psychologiques qui faisaient obstacle à mes envies. Il n’y avait plus vraiment de barrière morale à propos de l’Homme marié : s’il se passait quelque chose avec lui, je n’aurais pas l’impression de le voler à une autre. D’après ce que je savais de son mariage et même si je ne connaissais que sa version à lui, sa femme ne l’aimait plus, ne le touchait plus et le méprisait. Elle avait donc en quelque sorte renoncé à son droit sur lui. De plus, il avait affirmé sa volonté de la quitter, même s’il prenait son temps pour des raisons que je ne peux pas exposer ici.
C’était donc la barrière psychologique qu’il fallait faire sauter. Que voulait dire « principe de précaution » dans la vie amoureuse : dans le doute, ne rien faire par peur de souffrir et de perdre mon temps ? Souffrir, languir, c’est vivre au moins. J’avais envie d’émotions fortes, moi qui les refoule si facilement Agir trop prudemment, c’était me montrer frileuse et sédentaire, et même pas dans ma « mûre saison ».
J’ai donc décidé d’envoyer ma propre confession, et pour la première fois d’exprimer des sentiments positifs, c’est dire qu’il m’en a coûté.

Eh bien voilà, j’ai déjà changé d’avis. Une vraie girouette. J’ai désormais envie de te rencontrer parce que le mal est fait en quelque sorte, et que maintenant je préfère prendre un risque que le regretter plus tard.
Tu vas rire : le déclic est venu au moment où j’ai retrouvé ces vers de Baudelaire que je connais par cœur mais dont je n’avais jamais saisi la beauté. Sans essayer de décortiquer une fois de plus (c’est une façon de tuer la littérature), je ne veux pas être trop frileuse et trop sédentaire.
Or, c’est ce que je choisis d’être en appliquant le principe de précaution dans ma vie amoureuse. Je risque de passer à côté d’émotions à force de les fuir par peur qu’elles me submergent. C’est la première fois que je suis sincère, alors que toi tu l’as été déjà. Tu as dit que l’opinion que j’ai de toi compte à tes yeux. Quel aveu ! Au lieu de m’en réjouir je m’en suis méfiée. Dans mon refus de l’adultère, j’ai peur de passer en second, dans ma peur de te rencontrer, j’ai senti qu’il y avait une certaine peur de tes besoins (tu as besoin de tendresse, n’est-ce pas ?).
Cela ne préfigure en rien la suite des événements, tu t’en doutes. Le passage du virtuel au réel reste casse-gueule de toute façon. Si ça se trouve, on n’aura rien à se dire et on repartira chacun de notre côté !

(A suivre)

Celui qui n’était pas libre de répondre à mes désirs (3) Les Confessions

Jeudi, janvier 3rd, 2008

J’avais terminé mon mail incendiaire par une formule à peine plus polie « Tu as raison de présenter des excuses et je les accepte volontiers, la rancune ne faisant pas partie de mon vocabulaire ». Je fus assez étonnée de recevoir le lendemain une très longue lettre, qui commençait ainsi : « J’apprécie ta réponse et je t’en remercie parce qu’elle est très juste. C’est peut être ça que j’attendais de toi après tout. Elle est juste mais très dure j’en ai surement besoin ». J’étais assez admirative de sa capacité à encaisser les critiques et à admettre ses erreurs. Je n’ai pas regretté d’avoir déversé mon fiel, mais je savais que je n’allais pas rester dans le même registre si je lui répondais.

Je la trouve injuste sur un point: “étalage autosatisfait”. Je n’ai pas eu de crise de lucidité, je suis conscient en permanence du fait que j’ai plein de choses à raconter et j’aime le faire. Pas pour en mettre plein la vue, même si cela est perçu de cette façon.
(…)
Maintenant, même si je pense que tu n’apprécies guère que l’on fasse part de sa vie privée à quelqu’un que l’on ne connais pas, mais je pense que je te dois cet exposé, ne serait ce que pour le manque de respect que j’ai eu par rapport à ta situation. Je voudrais que tu saches pourquoi je suis paumé et je ne sais plus quoi faire de mon couple…

Sa confession a donc commencé. J’ai lu attentivement les raisons pour lesquelles il se disait si mal : son mariage était devenu un calvaire compte tenu de l’attitude qu’avait sa femme vis-à-vis de lui. J’ai cessé définitivement de m’identifier à elle et j’ai éprouvé un peu de compassion pour lui, d’autant qu’il ne cherchait plus à m’impressionner mais à me faire comprendre son lot quotidien du mieux qu’il pouvait. Son mail se terminait ainsi :

C’était une erreur grossière que de ne pas tout de suite t’exposer ma situation et jouer au joli coeur, je suis soulagé que tu aies accepté mes excuses. Ceci étant, j’ai tout fait pour que tu la comprennes dans mes messages et de fait tu l’as tout de suite compris.(…)
Voilà, c’est long, c’est dur à sortir, c’est pas terrible pour mon égo d’admettre que j’ai eu tout faux avec toi, mais par ce mail, j’espère que tu comprendras mieux mon désarroi et que je remonterai dans ton estime, que j’apparaitrait à tes yeux autrement que le mec que sa femme n’admire plus à raison et qui cherche une maitresse à la Feydau pour flatter son égo. Ca c’est faux.
Tu n’es pas psy (quoique l’enseignement, ça forme dans ce domaine), mais tu m’as mis une droite et analysé avec beaucoup de justesse, je serai ravi de savoir ce que tu ferais dans mon cas…

J’ai décidé de lui répondre le plus honnêtement possible, en essayant même de trouver des excuses à sa femme et à l’inviter à plus d’indulgence. Comme il m’invitait à trouver des solutions à son problème, je les lui ai présentées toutes, du statu quo au divorce, en indiquant ma préférence pour la dernière.

Dernière solution (ce que j’essayerais de faire à ta place mais je comprends que le courage puisse manquer): tu la quittes et basta. (…) tu seras un candidat parfait sur meetic ou ailleurs. Les filles vont se battre pour toi. Quand elles ont mon âge, elles commencent à desespérer, et le pouvoir glisse clairement en faveur des hommes.

Bien sûr que préconiser la séparation pouvait paraître intéressé de ma part, surtout si j’ajoutais qu’il aurait du succès avec les filles « de mon âge », mais je me suis réellement efforcée d’être objective. Je n’ai eu la réponse que quelques jours plus tard (soit deux semaines après le premier mail, soit déjà après la rentrée). Encore un très long mail, qui affinait la perception que j’avais de sa situation. Il racontait des détails précis sur un gros différend provoqué par sa femme. J’en fus si abasourdie que j’en ai perdu prudence et objectivité : « Ton mail m’a fait bouillir d’indignation, je ne sais pas pourquoi je prends tout cela à coeur, je ne dois pas être un bon coach en fait ». J’ai ensuite une fois de plus analysé sa situation en lui prodiguant des conseils et en l’invitant à réfléchir encore. Lorsqu’il a répondu, plus d’une semaine s’était passée car il était parti à l’étranger.

Ta réponse m’a profondément touché en ce sens qu’elle m’a mis devant l’issue sans doute inévitable de ma situation. (…) Malgré l’inévitable vanne sur mon incommensurable fatuité, j’ai quand même cru déceler un peu de compassion, je n’ose dire de sympathie à mon égard et je t’en remercie.
J’espère que ta rentrée se passe bien et que les élèves sont à la hauteur. (….) j’espère pouvoir un jour t’offrir un café ou un triple sec le jour ou je me pinterai comme dans les films pour oublier tout ça.

Je me pensais suffisamment blindée pour une rencontre, et j’ai donc accepté sans trop y réfléchir. Nouvelle semaine de silence et nouveau break à l’étranger, et il réitérait sa proposition. Cette fois-ci, j’ai préféré réfléchir et je n’ai pas répondu immédiatement. Du temps avait passé, et la perspective de rencontrer cet homme blessé ne me réjouissait pas particulièrement. Je le trouvais un petit peu intense, je n’étais pas sûre d’être à l’aise avec lui après ce grand déballage, et puis j’étais embarquée dans d’autres histoires, d’autres espoirs (d’autres déceptions). Ensuite je ne voyais pas trop ce que j’aurais à gagner à rencontrer un homme qui manifestement n’aurait pas de temps à me consacrer : une amitié, mais j’en doutais, ou le début d’une liaison qui m’aurait fait perdre du temps et qui potentiellement m’aurait fait souffrir. Je n’ai jamais répondu à ce mail.

(A suivre)

Ouf

Mardi, janvier 1st, 2008

Heureusement que mon chat est là, j’allais commencer un tchat !